< Previous4849Partita IIBWV 1004GIGAq. = 72Le caractère de cette danse est simple et rustique et l’on peut imaginer les paysans frappant du talon dans un rythme rapide sur la levée et le temps fort, ce qui se traduit par un coup d’archet vigoureux et rapide (q. = 72) au milieu et avec un poignet souple permettant une action rapide et bien « à la corde ».Celle-ci se compose d’une série de séquences ascendantes ou descendantes à formules répétitives que l’on pourra souligner par des nuances suivant leur courbe.Tempo constant, surtout dans les nombreux mouvements conjoints où l’on a tendance à presser.505152Partita IIBWV 1004CHACONNEq = 60Nous voici enfin devant « l’Everest des violonistes » !C’est un monument musical sans égal, qui développe en une grande série de structures variées un thème de 4 mesures sur une véritable fresque musicale en triptyque : 1ère partie, ré mineur ; 2ème, ré majeur; 3ème, ré mineur.Danse ancienne d’origine espagnole de rythme modéré, son tempo conseillé par Enesco reste stable (q = 60) du début à la fin, quelles que soient les grandes différences techniques entre ces multiples variations, qui s’enchaînent sans répit.Dans l’exposition du thème, Enesco ne faisait pas répéter l’accord sur la croche de levée, de façon à en différencier le poids chorégraphique d’avec le premier et le second temps, tel qu’il apparaît sur le manuscrit même de J.S. Bach.Cette première exposition du thème doit s’exprimer d’un archet largement distribué et très à la corde, faisant sentir l’ampleur de ce qui va suivre.Au contraire, la première variation qui commence à la mesure 9 s’exprime de manière plus modérée dans une nuance mf, pour ménager la possibilité d’un long crescendo dans le développement à venir.De même, on retrouvera une nuance p mesure 17 pour un développement semblable.Cette manière de reprendre chaque début de variation dans une nuance piano permet de suivre la courbe ascendante musicale d’un phrasé qui se conclut généralement dans un forté. Ceci évite la monotonie d’une grisaille sans couleur et retient l’attention et l’émotion de l’auditeur.En même temps que le volume sonore varie en fonction du phrasé, le vibrato qui doit toujours animer la main gauche s’intensifie ou se calme selon le tempérament qui caractérise chaque interprète. C’est en cela que se différencient les interprétations.La variation qui commence à la mesure 25 est d’une plus intense expression qui anime sa mélodie : allonger l’archet et vibrer chaque note. La suivante, mesure 33, commence par un partage entre les voix de soprano et basse, que l’on caractérisera par des qualités sonores différentes.Elle évoluera ensuite mélodiquement en passant par diverses tonalités, dont on fera ressortir les notes accidentées, dièses ou bémol, par de légères inflexions jusqu’à sa 53conclusion mesure 48. Là encore chaque artiste s’y exprime selon son tempérament. De la mesure 49 à 57, l’auteur, par des séquences à formules répétitives dont on fera ressortir les dessins successifs grâce aux coups d’archet indiqués par Enesco, nous conduit à l’inversion ornementée et très rythmique du thème.Mesure 57 commence une variation d’allure particulièrement énergique par son rythme très masculin, son échange basse/soprano et sa conclusion en arpèges très dynamiques.Mesure 65 commencent les variations de plus en plus rapides et dont l’alternance des notes liées et martelées ne doit pas altérer moindrement la régularité du tempo.Veiller particulièrement à ne pas accélérer les notes de précision en triple-croches. Le travail progressif au métronome s’avère très utile ! La justesse en bénéficiera également ainsi que la clarté des longues séries de notes conjointes.Mesure 77 revient un épisode très provisoirement plus calme, où l’on pourra, dans une nuance p dolce, retrouver plus d’expression, surtout entre 81 et 85, grâce aux intervalles diminués ou augmentés chers à J.S. Bach (et donc on respectera les doigtés d’Enesco). 85 est le début d’une très longue séquence de notes rapides de formes variées de toutes manières. D’abord par quatre notes liées et presque toutes conjointes (attention justesse !) et à partir de 89 en bariolages de diverses formules (observer attentivement leurs coups d’archet !).Comme d’habitude on s’efforcera de rester p le plus longtemps possible… (en dehors d’un léger crescendo de 101 à 105 où l’on retrouvera le p).Le véritable crescendo ne commencera qu’à 114 pour aboutir à 121 sur de fulgurantes (mais contrôlées) cadences qui conduiront à la réexposition grandiose du thème dans son tempo exact !Après cette exaltante tempête en ré mineur qui vient de s’exprimer en toutes sortes de bariolages arpégés, émaillés d’intervalles dramatiques ou apaisants et qui aboutit à cette éblouissante redécouverte du thème initial, arrive soudain selon le goût des contrastes du génial auteur, la seconde partie du triptyque en ré majeur (133).Enesco visualisait cet épisode tel un rayon de soleil passant au travers d’un vitrail, aboutissant sur les mains tranquilles d’un organiste… jouant un doux contrepoint, dont la tonalité de ré majeur apporte un apaisement bienfaisant pour l’interprète comme pour l’auditeur !Tout en gardant le même tempo, la nuance subito p et l’expressivité soudain disparue dans une main gauche détendue et à peine ondulante, procure un répit nécessaire… mais de courte durée, car dès la mesure 141 reprennent les activités rythmiques à travers une série de croches ascendantes, mais encore assez calmes, dans un coup d’archet « louré dolce »…Dès la mesure 149 apparaissent des double-croches qui réaniment l’ambiance, à travers diverses séquences répétitives ascendantes ou descendantes de plus en plus agitées, qui à partir de la mesure 161 va être marquée de manière obsédante par la 54note LA répétée trois fois d’abord dans la nuance p.Après un long crescendo qui va aboutir à 169 à une sorte d’acharnement sur cette note répétée non plus trois mais quatre fois et contredite par un commentaire en doubles cordes, qui finissent par donner à cette variation un caractère méphistophélique que l’on peut affirmer par des accents de plus en plus énergiques.Cette nouvelle et très évolutive ascension aboutit mesure 177 à un épisode très expressif qui doit être joué de manière soutenue avec un archet très à la corde, allongé sur des accords de plus en plus fournis de 3 et 4 sons avec un vibrato de plus en plus présent.À la mesure 201 éclate en accords arpégés l’apothéose de cette seconde partie en ré majeur du triptyque ! Allonger tout l’archet fff.Après une respiration, dont la longueur sera une véritable suspension angoissante entre le premier et deuxième temps de la mesure 209, on plongera littéralement sur l’accord de ré mineur qui ouvre la dramatique troisième partie de cette œuvre, à laquelle une interprétation convaincante doit donner une dimension Shakespearienne...Cet accord de ré mineur doit se faire de manière fp très contrastée, aussi bien dans le volume que dans l’expression qui passe brutalement de la plus grande exaltation ff au plus profond désespoir d’un pp aussi obscur qu’une nuit profonde.Tous les accords de cette variation doivent être pris en souplesse et pratiquement arpégés, avec plus de vibrato et très piano.Mesure 217 est le début tranquille d’une lente et longue ascension à travers des formules diverses de plus en plus expressives, qui aboutissent mesure 227 à une sorte de répit cadentiel presque AD LIBITUM et l’on se retrouve mesure 229 au début d’une situation décrite par Georges Enesco telle que la fameuse fresque sculpturale de Michelangelo nommée « Mater Dolorosa » et que l’on exprimera par des inflexions semblables sur chaque note de la ligne mélodique, en songeant à l’expression particulièrement douloureuse de ce chef-d’œuvre…Et l’on arrive enfin à la dernière variation d’arpèges en progression harmonique de plus en plus serrée qui aboutit à la CODA carentielle mesure 248 qui elle-même conduit à la dernière réexposition glorieuse du thème… pour laquelle on serait heureux de pouvoir saisir trois autres violons et cinq archets pour avoir la force suffisante d’exprimer ce que l’on ressent en un tel moment !!!555657Next >